lundi 17 mai 2021

Courrier au Ministre français de la Santé pour le retrait d'Oviedo

Objet: Retrait du projet de protocole additionnel à la Convention d'Oviedo du Conseil de l'Europe.

Monsieur le Ministre des Solidarités et de la Santé,

Au nom du collectif « Arrêt des traitements forcés », je vous contacte pour vous faire part de mes graves préoccupations concernant les discussions en cours sur l'adoption au Conseil de l'Europe du projet de protocole additionnel à la Convention d'Oviedo. Comme vous le savez peut-être, le Comité de bioéthique du Conseil de l'Europe (Comité DH-BIO) travaille depuis 2014 sur un projet de protocole additionnel à la Convention d'Oviedo sur les droits de l'homme et la biomédecine concernant la « protection des droits de l'homme et de la dignité des personnes troubles mentaux » sur la base d'une recommandation de 2004, l'accent étant mis sur le placement et le traitement involontaires.

Le texte et l'esprit du protocole vont à l'encontre de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, qui a été ratifiée par 46 des 47 États membres du Conseil de l'Europe, y compris la France, et constitue une menace pour les droits de l’homme en général. Des préoccupations et une opposition ont été exprimées par le Comité des Nations Unies sur les droits des personnes handicapées, le Rapporteur spécial sur les droits des personnes handicapées, le Rapporteur spécial sur le droit à la santé, le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire, de nombreuses organisations de personnes handicapées, les organisations de santé mentale et les organisations de défense des droits de l'homme, ainsi que le Commissaire aux droits de l'homme et l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe. En juin 2019, l'Assemblée parlementaire a adopté à l'unanimité une résolution sur la fin de la coercition dans le domaine des soins de santé mentale, appelant les États membres à entamer immédiatement la transition vers l'abolition des pratiques coercitives dans les établissements de santé mentale. En outre, dans sa recommandation 2158 (2019), l'Assemblée a invité le Comité des Ministres à réorienter les efforts de la rédaction du protocole additionnel vers la rédaction de lignes directrices pour mettre fin à la coercition en santé mentale. Une initiative similaire peut être vue par l'Organisation mondiale de la santé dans le cadre de son Initiative pour les droits de qualité, et un guide de bonnes pratiques à venir sur les services de santé mentale communautaires promouvant les droits de l'homme et le rétablissement.

Malgré l'opposition, les membres du Comité DH-BIO ont convenu de voter sur un projet final de texte lors de la réunion plénière du Comité du 1er au 4 juin 2021. Tous les États membres du Conseil de l'Europe, même ceux qui n'ont pas ratifié l'Oviedo Convention, ont le droit de vote à cette réunion. C’est dans ces circonstances que nous vous exhortons à vous opposer à l’adoption du projet de protocole à la Convention d’Oviedo et à faire en sorte que le représentant de la France vote contre l’adoption du protocole lors de la réunion plénière du Comité DH-BIO. Nous sommes prêts à vous rencontrer pour vous expliquer davantage nos préoccupations et éventuellement vous aider à élaborer des politiques conformes à vos obligations en vertu de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées.

Je vous prie d'agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de ma très haute considération.

Références:
ENUSP, European Network of Users and Survivors of Psychiatry.
https://enusp.org/2018/05/29/draft-additional-protocol-to-the-oviedo-convention-related-materials/

Rester Informé.
https://www.withdrawoviedo.info/join

Le toolkit de MHE est là (en anglais):
https://www.mhe-sme.org/advocacy-toolkit-against-draft-additional-protocol-oviedo-convention/


#WithdrawOviedo
"Coercion is not care." La coercition n'est pas du soin.

#Standup4humanrights



dimanche 9 mai 2021

Consultation ONU sur la désinstitutionalisation: notre communiqué pour la France

Notre collectif « Arrêt des traitements forcés » est un groupe d’usagers et ex-usagers de la psychiatrie en France[7]. Notre circonscription est constituée des personnes avec handicap psychosocial.

En France, en 2018, 108 900 enfants étaient institutionalisés en instituts médico-éducatifs (IME) et 15 980 en instituts thérapeutiques éducationels et pédagogiques (ITEP). Les critères pour le placement des enfants en IME sont, d’après le document de l’administration : « les déficiences à prédominance intellectuelle », et pour les ITEP, je cite: « les troubles du comportement qui perturbent leur socialisation et l’accès aux apprentissages, sans pathologie psychotique ni déficience intellectuelle »[1]. Le nombre de places est en augmentation[2]. 

L’enfant en France n’est généralement pas consulté pour les choix le concernant et ses choix ne sont pas respectés.

Nous demandons que les enfants soient consultés et que leurs choix soient respectés.
La réalité de ces instituts est sombre, avec des traitements psychiatriques forcés.
L’administration autorise la prescription du médicament Rispéridone aux enfants de 5 ans, sous certaines restrictions qui ne sont pas respectées en pratique[3].
Nous demandons qu’aucun traitement psychiatrique ne soit imposé à un enfant.
Aussi nous pensons que le modèle médical du handicap est toujours la norme dans les textes et les lois en France et nous demandons un changement urgent.

En France, en 2019, 319 000 personnes ont été hospitalisées à plein temps dans des unités psychiatriques. La durée moyenne d’hospitalisation sur l’année était de 56 jours. 81 000 personnes ont été hospitalisées de force. Ce nombre est en augmentation[4].
Un nombre inconnu de personnes est sous traitement psychiatrique forcé, certaines sous la menace d’une hospitalisation forcée, d’autres parce qu’elles ne peuvent trouver l’aide médicale dont elles ont besoin pour réaliser le sevrage des médicaments.

Notre témoignage, c’est que de nombreuses personnes ont été maltraitées dans les hôpitaux psychiatriques, tellement que certaines personnes ne parviennent pas à surmonter le traumatisme subi, et certaines ne consultent plus jamais un médecin, et certaines ont été forcées de s’exiler pour échapper à la menace des hospitalisations forcées.
Nous demandons l’arrêt immédiat des hospitalisations forcées et des traitements forcés et le changement des lois de santé mentale.

Les bonnes pratiques sont décrites sur le site du CHRUSP[5] et aussi dans la formation de l’OMS Quality Rights Training[6]. Nous demandons que ces bonnes pratiques deviennent effectives en France.


Références :

[1] Ministère des Solidarités et de la Santé : Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques. L’offre d’accueil des personnes handicapées dans les établissements et services médico-sociaux fin 2018. Thomas Bergeron, Laurence Dauphin
https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/publications/etudes-et-resultats/loffre-daccueil-des-personnes-handicapees-dans-les-0

[2] Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie: le bilan des plans, 2019.
https://www.cnsa.fr/outils-methodes-et-territoires-organisation-de-loffre/programmation-et-creation-de-places-en-etablissement-ou-service/le-bilan-des-plans

[3] Autorisation de mise sur le marché du rispéridone en pédopsychiatrie
http://agence-prd.ansm.sante.fr/php/ecodex/rcp/R0306587.htm

[4] Agence technique de l'information sur l'hospitalisation. Psychiatrie chiffres clés 2019
https://www.atih.sante.fr/sites/default/files/public/content/2554/atih_chiffres_cles_psy_2019.pdf

[5] CHRUSP good practices
http://www.chrusp.org/home/good_practices

[6] WHO Quality Rights training
https://www.who.int/publications/i/item/who-qualityrights-guidance-and-training-tools

[7] Le collectif:
http://depsychiatriser.blogspot.com/

 


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