mercredi 23 août 2017

ECT, une procédure criminelle

Par Luc.

Mise à jour 21/1/2024: les études ne montrent aucun bénéfice contre placebo.

"Il n’existe aucune preuve que l’ECT soit efficace pour sa cible démographique – les femmes plus âgées ou son groupe de diagnostic cible – les personnes gravement déprimées, ou les personnes suicidaires, les personnes qui ont d’abord essayé d’autres traitements sans succès, les patients involontaires ou les enfants et adolescents." [1]

Risque très élevé de pertes de mémoire permanentes à la suite des électrocutions. C'est mis en évidence pour 12 à 55% des personnes. [2]

Risque de dommages cérébraux, d'épilepsie, de mort, et risque anesthésique. 💀

Tout cela pour un procédé qui fait moins bien que le placebo!

Pire: la pratique ne respecte pas le consentement éclairé, car la personne souvent est déjà contrainte ou privée de liberté. On entend, par exemple: "Acceptez l'ECT et vous sortirez plus vite de l'hôpital."

L'histoire des traitements par choc.

Le principe des traitements de choc dans les asiles était d'impressionner, de terrifier même, les personnes internées.

L'histoire des ECT, ou électroconvulsivothérapie, alias sismothérapie, alias électrochocs, s'inscrit dans les traitements dit "de choc" inventés dans les asiles passés. Ces procédés consistaient en gros à traumatiser la personne par des interventions violentes. Il s'agissait de tortures destinées à impressionner la personne le plus fortement possible, et à la menacer de recommencer si elle ne se soumettait pas corps et âme au rôle imposé par le pouvoir asilaire. Ces procédés étaient pratiqués sur les personnes innocentes enfermées dans les asiles, afin de nourrir les prétentions médicales et scientifiques de leur geôliers.

L'inventeur de la "médecine de l'organe de l'âme" ou psychiatrie est le médecin allemand Johann Christian Reil (en 1808). Il pratiquait déjà ces traitements dit de choc. Un de ces traitements de choc, consistait à s'emparer du patient sans crier gare, et à le plonger nu dans un baignoire remplie d'eau glacée. Reil était fier d'avoir rafiné le procédé en faisant placer des anguilles vivantes dans la baignoire.

Un certain nombre de personnes ainsi internées vivaient habituellement prostrées dans le désespoir de devoir vivre enfermées à vie dans ces enfers d'inhumanité et d'indignité qu'étaient les asiles. Le Dr Reil s'émerveilla que son traitement de choc parvint à susciter des manifestations de protestation ou de fuite de la part de ses victimes. Il théorisa alors que les "maladies mentales" consistaient en déséquilibres des trois "forces mentales", qu'il nomma conscience de soi-même en tant qu'entité, circonspection et attention. Il institua les "traitements de choc" destinés à "corriger" ces "déséquilibres". C'était évidemment complètement pseudo-scientifique.


Les convulsions artificielles suivent la logique du "traitement de choc".


Avec le temps, la prétention pseudo-scientifique s'est renforcée de plus en plus. La torture "simple" ne suffisait plus. Il fut observé qu'après une crise d'épilepsie, les patients neurologiques présentaient un état post-critique, durant de quelques minutes à quelques heures, pendant lequel le patient fait l'expérience de la confusion, puis récupère. L'hypothèse fut émise que la crise convulsive "soignerait" les état confusionnels. 


La pseudo-science en action

Dans la même veine pseudo-scientifique, les psychiatres élaborèrent sur l'idée que l'épilepsie et ladite "schizophrénie" étaient deux conditions antagonistes, l'une excluant l'autre. Cette absurdité a été poussée jusqu'à transfuser du sang de personnes dites "schizophrènes" à des patients épileptiques afin de limiter leurs crises convulsives. Inversement, on était persuadé que les convulsions devaient logiquement "soigner" les patients étiquetés "schizophrènes". Le procédé permettait aussi de rendre l'imposture plus crédible, plus scientifique, en apparence. Différents moyens ont été mis en œuvre pour provoquer ces convulsions artificielles.

Entre 1917 et 1935, quatre méthodes furent utilisées en pratique psychiatrique pour induire des convulsions artificielles:

  1. L'hyperthermie, par exemple en injectant la tuberculine, ou en inoculant des agents pathogènes comme celui de l'érysipèle ou le plasmodium de la malaria, Julius Wagner-Jauregg, 1917.
  2. L'hypoglycémie, et le coma induit par injection d'insuline, Manfred J. Sakel, 1927.
  3. Les produits, comme le pentylènetétrazole ou metrazol, Ladislaus J. von Meduna, 1934.
  4. L'électrocution cérébrale, Ugo Cerletti and Lucio Bini, 1937.

La fondation Nobel, qui récompensa l'invention de l'horrible lobotomie, s'est discréditée à nouveau en nobélisant l'injection de la malaria en 1927. Le même Julius Wagner-Jauregg était persuadé que la masturbation causait ladite "schizophrénie" et faisait stériliser ses patients...


Il s'agit de formes de torture


Si le choc par bain glacé s'apparentait plus aux tortures comme le "waterboarding" (Guantanamo), le choc par convulsion cérébrale est plus proche des tortures par asphyxie pratiquées par l'Apartheid, parce que celles-ci laissent des dommages cérébraux irréversibles, à type de déficience cérébrale chronique.


L'électrocution cérébrale était un procédé destiné à terrifier la victime.


Coté effet terreur, c'est garanti: l'électricité faisait figure de science avancée, et était associée aux manipulations de la vie et de la mort avec les fictions comme Frankenstein (Mary Shelley, 1818). Le matériel est impressionnant. L'anesthésie générale fut introduite plus tard pour limiter les mouvements cloniques responsables de fractures. Cette procédure, qui fait des médecins anesthésistes les complices actifs des tortionnaires-charlatans, donne encore plus de crédit au procédé, au yeux de tous.

L'ensemble anésthésie + procédure impressionnante constitue le plus parfait des placebo pour obtenir des "résultats" qui évidemment ne durent pas.


Le complet ridicule

Les électrochocs ont été inventés en 1937. Aujourd'hui, il n'existe pas de modèle des "maladies" traitées, ni d'ailleurs de notions très claires quand au mécanisme d'action des électrocutions.

Le dommage provoqué par l'électrocution cérébrale s'accompagne d'un pic des hormones glucocorticoïdes. C'est connu depuis fort longtemps [3][4], tout comme il est connu que l'administration de glucocorticoïdes à des personnes dépressives les améliore, mais à très court terme seulement.


L'infâmie

L'histoire des ECT, comme celle de la psychiatrie, est faite d'une extraordinaire répétition des cycles de dénonciation, oubli, et retour en force. C'est une disgrâce des media, qui publient sans se lasser ces articles triomphalistes constitués de contre-vérités. Et aujourd'hui, à nouveau, les électrochocs reviennent en force. Il faut dire qu'une seule séance de dommage cérébral irréversible pseudothérapeutique coûte assez cher et que les incitations existent.

Les contre-vérités assenées et médiatisées sont extraordinaires: on nous affirme que la procédure est "sans danger", que le procédé "remodèle" et "régénère" les tissus, que les pertes de mémoire sont "transitoires", etc...


L'effet majeur, en dehors des accidents d'anesthésie, est le dommage cérébral irréversible.


Coté physiologie, c'est nettement moins anodin que les anguilles vivantes. On peut même affirmer que le dommage cérébral irréversible est la conséquence prévisible de ces pratiques d'ECT, quand ce n'est pas l'épilepsie, ou encore la mort en effet secondaire de l'anesthésie générale.

Déjà en 1977, c'était complètement connu et prouvé. [5]
Peter Breggin a rassemblé les documents sur ces dégâts cérébraux [6], et présenté les déficiences cérébrales chroniques provoquées par la répétition des séances.

Les séances répétées réalisent une véritable lobotomie électrique [7].
 

Primum non nocere

A vous de juger ce que font ces psychiatres prescripteurs d'ECT du précepte de base de la médecine "Primum non nocere". En priorité, ne pas nuire. (Thomas Sydenham 1624 – 1689).

L'avocat Wayne Ramsay n'hésite pas à parler de crime contre l'humanité. [8]


Pourquoi ces pratiques horribles?


Dans certains cas, les dépressions peuvent s'aggraver avec les médicaments, les dits "antidépresseurs", parce qu'on intoxique la personne au lieu d'adresser les causes psychosociales de la demande. On fabrique ainsi des conditions iatrogènes, des "bipolarités", et des dépendances pharmacologiques qui sont difficiles à soigner. Les pseudo-diagnostics psychiatriques sont démobilisants et produisent le désespoir.

Il me semble que l'aide à apporter à une personne en condition dépressive est d'abord une affaire humaine, qui met en jeu les qualités humaines individuelles et le soutien communautaire. Quand il n'y a ni carence, ni intoxication, ni médicament causal, ni cause biologique, alors l'aide est faite de présence, de soutien, d'écoute en priorité, de défense des droits humains (sécurité, logement, moyens, accès à la justice, non discrimination, etc), possiblement d'une proposition d'aide psychologique (comme la thérapie cognitive et comportementale) ou de dialogue comme le conseil conjugal ou l'approche de dialogue ouvert avec l'entourage et les intervenants sociaux, ou d'aide professionnelle ou légale, ou encore un travail de deuil selon les cas, et dans certains cas l'arrêt d'une addiction, une meilleure hygiène de vie, et possiblement un travail de nature spirituelle susceptible de donner du sens aux épreuves que la personne traverse et de redonner espoir ou acceptation.

Mais on n'est même pas dans le début du commencement d'une réponse appropriée avec les électrocutions cérébrales. On a postulé sans la moindre preuve que la cause de la dépression était une anomalie biologique du cerveau. On s'est très probablement trompé, mais on bricole quand même le cerveau avec des procédures horribles et le résultat est aberrant: on est en réalité dans l'anti-réponse à la demande de la personne.








Références:

[1] Read, 2020 "Electroconvulsive Therapy for Depression: A Review of the Quality of ECT versus Sham ECT Trials and Meta-Analyses"  Read, John, Kirsch, Irving, McGrath, Laura, Ethical Human Psychology and Psychiatry, Apr 2020, DOI: 10.1891/EHPP-D-19-00014
https://connect.springerpub.com/content/sgrehpp/early/2020/04/02/ehpp-d-19-00014

[2] Read, 2022 "A response to yet another defence of ECT in the absence of robust efficacy and safety evidence." Epidemiology and Psychiatric Sciences. 2022;31:e13. doi:10.1017/S2045796021000846
https://www.cambridge.org/core/journals/epidemiology-and-psychiatric-sciences/article/response-to-yet-another-defence-of-ect-in-the-absence-of-robust-efficacy-and-safety-evidence/A9E878F53979A44ED9E5FF0DC269C187

[3] "Adrenocortical responsibility in relation to psychiatric illness and treatment with ACTH and ECT." (PMID:14897894)
REISS M , HEMPHILL RE , EARLY DF , MAGGS R , COOK ER , PELLY JE 
Journal of Clinical and Experimental Psychopathology [01 Jul 1951, 12(3):171-183]
http://europepmc.org/abstract/med/14897894

[4] "Effects of electroconvulsive therapy on neuropsychological function and circulating levels of ACTH, cortisol, prolactin, and TSH in patients with major depressive illness"
Acta psychiatrica scandinavia, December 1985
http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1600-0447.1985.tb02651.x/full

[5] "Shock Treatment, Brain Damage, and Memory Loss: A Neurological Perspective"
John M. Friedberg, M.D. American Journal of Psychiatry 134:9, September 1977. pp: 1010-1013.
http://www.electricshocktherapy.info/uploads/4/0/7/6/4076267/shock_treatment_brain_damage_and_memory_loss_-_john_m_friedberg.doc

[6] Peter Breggin  http://www.ectresources.org/
 
[7] Description de la lobotomie électrique:
"Electroconvulsive therapy reduces frontal cortical connectivity in severe depressive disorder"
Jennifer S. Perrin, Susanne Merz, Daniel M. Bennett, James Currie, Douglas J. Steele, Ian C. Reid,
and Christian Schwarzbauer, 2012
http://www.pnas.org/content/109/14/5464.full.pdf

[8] "Psychiatry's Electroconvulsive Shock Treatment
A Crime Against Humanity" par Wayne Ramsay, 2014
http://www.wayneramsay.com/ect.htm

jeudi 17 août 2017

"Traitement", poésie par Jhilmil Breckenridge


C'était un traitement
Ces mains rampant sur votre corps
Le poison injecté
Comme vous êtes dépouillée
Traînée le long du couloir,
La légère odeur de formaldéhyde
Et de phényle

C'était un traitement
Le rire des infirmières
La condescendance des médecins
Poser les mêmes questions
Tous les jours
Jusqu'à ce que vous prononciez les mots qu'ils veulent entendre

C'était un traitement
C'était un traitement
C'était un traitement

Dans un hôpital avec des fenêtres condamnées
Dans un hôpital avec plus de gardes
Que de médecins

C'était un traitement
Le réveil
Aux odeurs d'aliments avariés
Le rire des gardes
La sonnerie de leurs téléphones cellulaires
Dans votre cellule

C'était un traitement
Amitié avec Rajan, guide touristique venu d'Ajmer
Qui parlait de l'amour, de la perte et du désir,
Bavant, les pieds dans les chaînes,
Ses yeux me racontent cent histoires

C'était un traitement
Prendre une mère à ses fils,
C'était un traitement

Et quand ils enlèvent tous les derniers lambeaux de la dignité humaine
Avec vos vêtements, la peau sur vos os,
Le rire dans vos yeux, et le soleil sur votre langue
Ils marchent avec la tête haute
Ce sont des médecins, vous voyez
Le traitement est le nom du jeu

Et c'était un traitement


(traduit de l'anglais)


that was treatment
those hands crawling on your body
the poison injected
as you are stripped
dragged along the corridor,
the faint smell of formaldehyde
and phenyl

that was treatment
the laughing of nurses
the condescension of doctors
the asking of the same questions
everyday
until you utter the words they want to hear

that was treatment
that was treatment
that was treatment

in a hospital with walled windows
in a hospital with more guards 
than doctors

that was treatment
the waking up
to odours of stale food
the laughter of guards 
the ringing of their cellphones
in your cell

that was treatment
befriending of rajan, tour guide from ajmer
who spoke of love, loss and longing,
drooling, his feet in shackles,
his eyes telling me a hundred stories

that was treatment
taking a mother from her sons,
that was treatment

and when they strip every last bit of human dignity
along with your clothes, the skin on your bones,
the laughter in your eyes, and the sun upon your tongue
they walk with their heads held high
they are doctors, you see
treatment is the name of the game

and that was treatment

mercredi 16 août 2017

Memes for activism against forced psychiatry, in French and in English. Mèmes pour la prohibition absolue des hospitalisations forcées et des traitements forcés


Here you'll find memes to share freely. These pictures are under creative commons licence (like wikipedia). In English, French and other languages.

Creative Commons License
This work is licensed under a Creative Commons Attribution 4.0 International License

On Flickr too:

In English: https://flic.kr/s/aHsmiSqaQb

En Français sur Flickr: https://flic.kr/s/aHsmb789tU


Je vous propose une série de mèmes à partager sur internet pour la campagne en faveur de la prohibition absolue des hospitalisations forcées et des traitements forcés, en application de la Convention ONU CDPH, relative aux droits des personnes handicapées.

Ces images sont sous licence creative commons (comme wikipedia): vous pouvez partager librement ce travail sur vos blogs ou sur les media sociaux. Vous pouvez traduire les images dans une autre langue, si vous le désirez. Dans ce cas, laissez-moi un message sur ce blog, et je placerai ici le dessin à partager dans votre langue.

La campagne est internationale. Ces images sont en anglais, en français, ou dans d'autres langues.


The Museum / Le Musée














Partial abolition / Abolition partielle









The classroom / La salle de classe










Yes, it is required / Oui, c'est obligé...

 







Dogma









Miranda warning








The algorithm / L'organigramme







You did not take your medication / Vous n'avez pas pris vos médicaments











The threat / La menace









No, thank you. / Non, merci.












New markets / Nouveaux marchés









State protected criminals / Des criminels protégés par l'état








The drug that renders you insane / Le médicament qui rend fou











#absoluteprohibition #CRPDnow #Standup4humanrights

mardi 15 août 2017

A propos de la torture psychiatrique par Initially NO, campagne prohibition absolue

A propos de la torture psychiatrique par Initially NO
Publié le 6 mars 2016
Campagne pour la prohibition absolue des hospitalisations forcées et des traitements forcés.

Publié en anglais in extenso sur le site de Initially NO.



Initially NO a rassemblé art, graphismes, récit, essai et les articles de la CDPH contenant des droits qui lui ont été refusés, dans une composition belle et émouvante affirmant une demande de justice. Puisque l'art et les graphismes font partie intégrante de son travail et que je ne peux pas reproduire la disposition ici, je partage son introduction et quelques exemples du travail artistique et je vous invite à visiter l'original sur son site afin d'apprécier l'effet complet. http://www.initiallyno.com/



Le déni de nos droits de l'homme



Les droits qui me furent refusés encore et encore pendant une période de 14 ans (1998-2012) réveillent en moi de tels sentiments que cela ne me fait pas souhaiter essayer de parler de ceci à nouveau.

Cela me fait tellement de peine, c'était si douloureux, cela me gêne de me souvenir, mais cela me dérange encore plus de savoir que plus de 5700 personnes sont soumises à une telle horreur, chaque année dans l'état de Victoria, en Australie, des personnes qui disent vigoureusement « Non, je ne le veux pas », très clairement, et qui sont ensuite placées sous des ordonnances de traitement communautaire forcé et qui sont torturées avec des injections forcées, de l'électricité et des rendez-vous verbalement abusifs, qui doivent être respectés, ou bien elles seront mises en détention arbitraire à nouveau. Cela me fait mal que les personnes qui disent qu'elles ne souhaitent pas prendre des prescriptions psychiatriques soient ensuite soumises pendant plus longtemps au système.





Lorsque vous refusez d'être injecté, ils font cela. Un ambulancier m'a dit qu' « il n'était qu'une petite roue dans un grand engrenage. » C'est le symbolisme de ceci et aussi profiter des filles. Autrement dit, beaucoup de mains sur une petite jeune femme, comme je l'étais, tandis qu'on la déshabille et qu'on abuse d'elle.

C'est ce qui se passe lorsque vous avez des menaces de traitements pires comme les électrochocs et la détention si vous ne vous pésentez pas pour une injection bimensuelle de "dépôt". Je devais faire semblant d'être contente avec ce scénario, à ce point. (J'ai renoncé ici aux mots de juron exprimant mon vrai sentiment, afin de me conformer à la campagne prohibition absolue de la CDPH de l'ONU.)



Article 15 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées

Droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

1. Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. En particulier, il est interdit de soumettre une personne sans son libre consentement à une expérience médicale ou scientifique.




Je n'ai pas mérité d'être torturée par le système psychiatrique.
Ce n'était pas pour mon bien!


(traduit de l'anglais)

Je n'oublierai jamais, par Irit Shimrat, campagne Prohibition Absolue

Je n'oublierai jamais par Irit Shimrat
Publié le 25 mars 2016

Un travail en cours

Je n'oublierai jamais, et pourtant je souhaiterais pouvoir le faire, comment est ressentie la brutalité psychiatrique. Être emmenée à l'hôpital par les flics, par l'usage brutal de la force, menottée, alors que mon seul crime était la confusion.

Être dépouillée nue devant les hommes. Être attachée à une civière dans la salle d'urgence psychiatrique. Être piquée douloureusement dans la fesse par une infirmière brandissant une aiguille remplie d'un médicament qui a eu des effets immédiats et cauchemardesques. Être ignorée par les infirmières en train de bavarder, alors que j'ai murmuré, puis dit, puis crié que je devais aller aux toilettes. Être laissée dans ma propre merde pendant des heures car elles étaient occupées à discuter de copains et de styles de cheveux.

Être véhiculée sur roulettes dans une cellule en béton, meublée uniquement avec un matelas au sol, une toilette en métal et un évier minuscule, une fenêtre d'observation dans la porte métallique et une caméra au coin du plafond. Être laissée là pendant des jours, sous la lumière fluorescente éclatante, avec quelqu'un qui vient trois fois par jour pour laisser un repas triste et fade dans un plateau en plastique sur le sol. Faire l'actrice pour la caméra et écrire sur les murs avec ma merde car les médicaments qui étaient supposés m'assommer m'ont rendue plus dingue et encore plus dingue.

Finalement, être relâchée dans le service, mais être renvoyée brutalement de nouveau dans l'isolement cellulaire chaque fois que je "faisais une scène". Apprendre lentement et douloureusement à se conformer, afin de gagner de tels "privilèges" comme de porter des pyjama réels, puis mes propres vêtements; Être autorisée à fumer une cigarette; Être autorisée à faire un appel téléphonique. Être moquée et brutalisée par des infirmières stressées.

Finalement, être autorisée à recevoir les visiteurs, seulement pour les avoir en train de me regarder fixement dans l'horreur et la pitié, car je traîne les pieds comme un zombie, beaucoup trop droguée pour tenir une conversation. Finalement, apprendre les mots magiques qui m'ont fait sortir: « Je comprends que je suis malade et que j'ai besoin de prendre ces médicaments pour le reste de ma vie ». Des médicaments qui avaient déjà produit la bouche sèche; la peau qui desquame; la constipation extrême; les spasmes musculaires douloureux; l'incapacité de m'asseoir, de me tenir debout ou de rester immobile - sans parler de leurs effets sur mon esprit: la terreur, l'agonie, mon échec absolu à être capable de m'accrocher à moi-même. La certitude - ma seule certitude - que j'étais morte et que j'étais en enfer. Que j'étais punie pour des crimes dont je ne me souvenais pas. Que je ne pourrai jamais plus vivre à nouveau dans le monde.

Je me suis trompée dans cette certitude, mais cela a été un chemin difficile, et j'ai dû voyager à travers cela de nombreuses fois. Toujours, quand je reviens dehors dans le monde, je me retrouve souffrante des effets de l'institutionnalisation, terrifiée par la solitude, d'avoir à m'occuper de moi-même, de ne pas être capable de m'en sortir au delà de la poubelle. J'ai dû souffrir les symptômes de sevrage de quelque produit que ce soit, qu'ils me forcèrent à prendre, et que j'arrête de prendre aussitôt que je suis sortie. J'ai été forcée de me punir moi-même, de me frapper moi-même, de me crier dessus moi-même pour avoir été à ce point stupide pour me retrouver enfermée à nouveau. J'ai dû traverser des semaines ou des mois à vouloir me tuer afin de m'assurer que cela ne m'arrivera jamais à nouveau. J'ai dû reconstruire lentement ma vie. Et j'ai dû vivre avec les effets permanents, physiques et émotionnels, d'être empoisonnée par des médicaments psychiatriques et traumatisée par la cruauté institutionnelle.

Ma vie a été une vie protégée, dans l'ensemble. Je suis née et j'ai grandi dans une famille de classe moyenne aisée, avec beaucoup d'amour et de soutien parentaux, et sans violence ni négligence. Je n'ai jamais été violée ni battue ni affamée. Néanmoins, je me suis ennuyée en tant qu'adolescente, j'ai consommé beaucoup de drogues, et j'ai fini par devenir folle, plusieurs fois, au cours des années. Mais être dingue n'était pas, en soi, une mauvaise chose. Si j'avais été autorisée à traverser cela - si j'avais été traitée avec gentillesse et compassion, et encouragée à explorer mes pensées et mes visions et à leur donner du sens - cela aurait pu être une expérience merveilleuse, comme le sentiment qui a toujours accompagné le démarrage de ces aventures. Cela pourrait m'avoir enrichie.

La seule chose vraiment mauvaise qui me soit arrivée est la psychiatrie. Cela a endommagé mon corps et mon esprit, cela a détruit mon estime de soi et cela m'a forcée à me réinventer moi-même, encore et encore, à chaque fois qu'elle me déchirait en morceaux.

(traduit de l'anglais)

mardi 8 août 2017

Poésie et art par Jhilmil Breckenridge, "Staring", Campagne Prohibition Absolue

Poésie et art par Jhilmil Breckenridge, 3 mars 2016

Publié sur le blog de la campagne Prohibition Absolue

Solitude, par Jhilmil Breckenridge



"Regarder Fixement  (Staring)"


Si tu regardes fixement dehors à travers une fenêtre grillagée
Un jardin désolant un certain matin de septembre
Si le margousier dans le jardin te rappelle ta maison
Vaste, vieux, intemporel
Si tu te souviens quand tu jouais sous un margousier à Allahabad
Et tu peux presque entendre le rire des enfants qui jouent
Dans la chaleur d’une après-midi étouffante de juin
Et parce que la fenêtre est étroite et barrée et ne peut pas s’ouvrir
Parce que tu veux respirer la liberté
Parce que tu veux prendre une douche sans qu’ils ne te regardent
Parce que tu ravales en silence tes hurlements
Parce que ton esprit a commencé à se brouiller
Parce que ta langue a commencé à marmonner
Parce que tu as commencé à baver
Parce que tes doigts tremblent quand tu écris
Parce que les mots Ritalin Prozac Depakote Lithium
Ont commencé à résonner comme une poésie
Parce que tu sens ta résistance lentement mourir
Parce que tu commences à dire les mots qu’ils veulent entendre
Parce que tu sais que le regard vernissé dans les yeux des autres
Est aussi dans tes yeux
Parce que cette jonction entre le muscle et l'os s'affaiblit
Parce que tu dors pendant des heures
Parce que maintenant tu souris à tes médecins
Parce que tu cries quand le bazar roulant de la machine ECT est amené 
Parce que personne ne se soucie
Parce qu'une fois que tu es marquée, tu le seras pour toujours
Parce qu'autrefois les asiles étaient des exhibitions de phénomènes
Parce que l'asile n’est pas ce qu’il signifie
Tu retournes regarder fixement
          Regarder fixement
                    Regarder fixement
                              Regarder fixement
                                        Regarder fixement
                                                  Regarder fixement
                                                            Regarder fixement
                                                                      Regarder fixement



Jhilmil Breckenridge est poète, écrivaine et activiste dans le domaine de la santé mentale. Actuellement elle est au Royaume-Uni pour un doctorat en Ecriture Créative, centré sur la Santé Mentale. Elle a été emprisonnée par deux fois illégalement en Inde. Les lois sur la santé mentale existantes en Inde suscitent en elle l'horreur et elle aimerait faire quelque chose pour les changer. Pour la contacter jhilmilbreckenridge@gmail.com 

(Traduit de l'anglais par Erveda Sansi et Luc.)



lundi 7 août 2017

"Folie" Poésie et Dessin par Roberta Gelsomino, Campagne prohibition absolue

Poésie et Dessin par Roberta Gelsomino, 23 mars 2016

Publiés sur le blog Il Cappellaio Matto.




Folie

Rageant mon père feuillette
Les habituels documents perdus;
J'imagine tandis qu’il blasphème encore
Une lettre qui plus puissamment crie:

Chère Commission,
Cette fois, je vais parler en mon nom,
Vous Illustres derrière un bureau
En quelques minutes vous évaluez et moi et ma vie;
Personne ne sait et vous, les jamais vus, vous vous haussez vous-même, de ce savoir,
Comme tête de bétail confirmée et marquée au séant
Hâtivement;
Certainement n’est pas mon bien ce que vous tous prenez au sérieux;
Vous ressassez papiers et signatures en abondance
Comme si je n’existais pas à vous parler ici
Dans cette chambre.
Vous donnez à entendre qu'envers quelqu’un qui m’aide
Je dois être stupide, folle et muette.
«Nous payons et c’est là sa reconnaissance»
Donc, pour vous parler, cela semble le bon moment. 
Si à évaluer, vous aviez vraiment le tact
C’est à dire cohérence avec le pacte d’Hippocrate
Vous proposeriez d’autres solutions à mes besoins
Même encore plus fort, et non pas un chantage. 
J’espérai seulement être crue, quelle idiote!
A l’humiliation paternelle épuisante
J’ai peur de me brûler, de tomber, me blesser
Que peux-tu en savoir de cette condition! 
L’aide vous ne voulez donner, à vous faire perdre du temps,
«Est-ce la seule en cette condition? Pauvres sont les parents!»
Je crois en ces choses comme folie et horreurs. 


Poème et dessin de Roberta Gelsomino

obygelsomino@gmail.com
edizionieventualmente.it

(Traduit de l'italien par Erveda Sansi et Luc.)


Follia

Sfuriato mio padre scartabella
i soliti smarriti documenti
immagino mentre ancor bestemmia
una lettera che più potente grida.
Gentile Commissione
questa volta parlerò io a mio nome
Voi Illustri dietro una scrivania
in pochi minuti a valutar me e la vita mia;
Nessun ne sa e voi mai visti vi eleggete a sapere
come capo di bestiame confermata e marchiata nel sedere
in tutta fretta
non è certo il mio bene a cui voi tutti date retta.
Vi rifate a carte e firme in abbondanza
come se io non esistessi a parlarvi qui
in questa stanza.
Fate intendere che per qualcuno che mi aiuta
io debba stare scema, pazza e muta
“Noi paghiamo e questo il suo ringraziamento”
dunque per dirvi mi sembra un buon momento.
Se a valutar, se voi davvero aveste tatto
cioè coerenza con l’Ippocrate patto
proporreste altre soluzioni al mio bisogno
persino più forte, e non un ricatto.
Speravo solo di essere creduta, che idiota!
alla paterna sfiancante umiliazione
ho timore di scottarmi di cadere di ferire
che ne puoi sapere di questa condizione!
Aiuto voi non ne volete dare, perdere tempo a fare,
“V’è la sola messa così? Poveri genitori!”

Credo in cose così follia ed orrori.

samedi 5 août 2017

Entretien avec le Dr Giorgio Antonucci présenté par l'association "Il Cappellaio Matto", campagne Prohibition absolue

Un entretien avec le Dr Giorgio Antonucci présenté par l'association "Il Cappellaio Matto", 

Publié le 25 mars 2016

Campagne pour la prohibition absolue des traitements forcés et des hospitalisations forcées.


"Antonucci les libère tous", dessin de Vincenzo Iannuzzi

L'association italienne des utilisateurs et survivants "Il Cappellaio Matto" (le chapelier fou) est heureuse de partager un long entretien avec Giorgio Antonucci, médecin, psychanalyste et directeur de deux services d'hôpitaux psychiatriques pendant de nombreuses années.

Il a lutté pour prévenir et abolir les traitements psychiatriques forcés, pour libérer les personnes des hôpitaux psychiatriques italiens depuis le début des années 60 et surtout pour démontrer qu'un diagnostic psychiatrique est en réalité un jugement psychiatrique, soutenu par un préjugé social.

La première des huit tranches de l'interview peut être vue ici:


La vidéo est disponible avec des sous-titres en anglais grâce aux efforts de Il Capellaio Matto.

C'est la première publication dans une langue étrangère, excepté un livre en danois, de Svend Bach, professeur de littérature à l'Université d'Aarhus, qui lui est consacré: "Antipsykiatri eller ikke-psykiatri".

Giorgio Antonucci a commencé son travail de médecin à Florence (Italie), en s'efforçant de résoudre les problèmes des personnes qui risquaient de se retrouver en psychiatrie. Il a commencé à s'engager dans la résolution des problèmes psychiatriques, en essayant d'éviter les hospitalisations, les internements et tous types de méthodes coercitives. En 1968, il a travaillé au Cividale del Friuli (avec Edelweiss Cotti), un hôpital public, la première alternative italienne aux hôpitaux psychiatriques. En 1969, il a travaillé à l'hôpital psychiatrique de Gorizia, dirigé par Franco Basaglia; Il a critiqué le fait que dans cet hôpital, les électrochocs n'aient été abolis que pour les hommes et ont continué d'exister pour les femmes. (Il faut tenir compte du fait que Basaglia a été absent la plupart du temps, à des conférences, etc..., puis est mort à 56 ans en 1980). Antonucci a déclaré que, bien sûr, Basaglia a été le premier à mettre en question l'hôpital psychiatrique et qu'il a dit à juste titre qu'il s'agissait d'une affaire de classe. Mais Basaglia n'est pas allé jusqu'au bout pour dire que l'hôpital psychiatrique est un préjugé en soi, non pas seulement un bâtiment, et il a passé son temps en conférences partout dans le monde et à écrire des livres, des articles, etc... Antonucci quant à lui travaillait effectivement tous les jours avec les patients, afin de leur rendre leur liberté.


Giorgio Antonucci et Edelweiss Cotti


De 1970 à 1972, Antonucci a dirigé le «Centre d'hygiène mentale» de Castelnuovo nei Monti dans la province de Reggio Emilia. De 1973 à 1996, il a travaillé comme médecin principal dans deux hôpitaux psychiatriques de Bologne, Osservanza et Luigi Lolli, en démantelant des services psychiatriques et en créant de nouvelles opportunités résidentielles pour les anciens internés, en leur donnant une complète liberté de choix personnel. Un exemple réussi unique en Italie et probablement dans le monde. D'un point de vue politique et religieux, il est anarchiste, libertaire et athée.

« Les traitements forcés sont des violations de leurs droits et sont nuisibles, aux personnes elles-mêmes, à leurs pensées et à leurs vies, c'est ainsi j'ai commencé à m'occuper de la psychiatrie », dit-il.

Dans cette courte conversation avec l'acteur et activiste Saverio Tommassi, Antonucci discute de la différence entre les systèmes authentiques de guérison et la psychiatrie comme moyen de contrôle social, "un jugement moraliste et la prétention de contrôler le comportement de ceux qui ne respectent pas les conventions sociales". Il explique la genèse de sa propre opposition à toutes les formes d'incarcération psychiatrique, de contention et de médication forcée: en tant que jeune médecin, il a été témoin de l'internement dans les asiles de femmes considérées comme "difficiles", qui avaient été prostituées auparavant et avaient été qualifiées de folles par les autorités catholiques. Il a rapidement compris que 90% des occupants des établissements étaient les "socialement indésirables" - les sans-abri, les femmes au foyer rebelles, les chômeurs -, etc.:

« A l'intérieur des hôpitaux psychiatriques, ce n'étaient pas les personnes folles qui étaient enfermées - comme on le croit habituellement - mais des personnes malchanceuses auxquelles il est arrivé de se retrouver dans des situations difficiles. »

« Je pense que souvent, en plus du danger de l'opinion psychiatrique, la chose la plus dangereuse c'est quand une personne se résigne à se laisser convaincre elle-même qu'elle est malade. »

Le docteur Antonucci n'a jamais pratiqué de traitement forcé ni d'hospitalisation forcée, et n'a jamais prescrit de médicaments psychiatriques, car, a-t-il déclaré: « En tant que médecin, j'ai fait le serment d'Hippocrate de ne jamais nuire à une personne. »

Plus tard, Antonucci décrit les "calate", les expéditions de masse des citoyens italiens pour investiguer les salles psychiatriques et pour voir exactement comment les détenus étaient traités: « C'était la cause d'une grande disgrâce pour les médecins parce que les personnes, y compris les enfants, ont été trouvées attachées aux chaises ou aux lits et enfermés à l'intérieur de petites pièces. Et ainsi pour la première fois, toute une population composée de paysans, d'autorités locales, de travailleurs, de maires de canton, même un député parlementaire, tous ont remis en cause les asiles en tant qu'institution. »

La langue de Giorgio Antonucci est toujours très simple, sans mots difficiles, car il dit que ses paroles doivent toucher toutes les personnes. Le docteur Giorgio Antonucci croit en la valeur de la vie humaine et pense que c'est la communication, et non pas l'incarcération imposée ni les traitements physiques inhumains, qui peut aider une personne en difficulté - si la personne veut être aidée. 

A l'institution d'Osservanza (Observance) à Imola, en Italie, le docteur Antonucci a traité des douzaines de femmes dites schizophrènes, dont la plupart avaient été continuellement attachées à leurs lits ou maintenues dans des camisoles de force et lobotomisées avec des médicaments psychiatriques. 

Tous les traitements psychiatriques usuels ont été abandonnés, ainsi que les médicaments psychiatriques, sauf si une personne voulait continuer à les prendre. Le docteur Antonucci a libéré les femmes de leur confinement, en passant beaucoup d'heures par jour à discuter avec elles afin d'établir une communication. Il a écouté des récits d'années de désespoir et de souffrance institutionnelle.

Il s'est assuré que les patients soient traités avec respect et sans l'usage de médicaments psychiatriques. En fait, sous sa direction, le service a été transformé de la garde supposée la plus violente en un service autogéré. Après quelques mois, ses patients "dangereux" étaient libres, marchant tranquillement dans le jardin et dans les rues de la ville. La plupart d'entre eux ont été déchargés de l'hôpital et pourraient retourner chez leurs familles, mais si quelqu'un le voulait, il pouvait rester là-bas, et recevait deux clés: l'une pour la porte d'entrée et l'autre pour sa propre chambre. Ensuite, beaucoup d'entre eux ont appris à travailler et à s'occuper d'eux-mêmes pour la première fois dans leur vie.

Les résultats majeurs du Dr Antonucci ont aussi été obtenus pour un coût très inférieur. De tels programmes constituaient un témoignage permanent de l'existence à la fois de réponses authentiques et d'espoir pour les personnes gravement troublées.

Dacia Maraini, l'un des écrivains italiens les plus célèbres, dans une interview avec à Giorgio Antonucci, se demande pourquoi, compte tenu des bons résultats obtenus, il n'en est pas de même dans d'autres services que le sien: « Tout d'abord parce que c'est très fatiguant », répond Antonucci avec sa voix tranquille, « il m'a fallu cinq ans de travail très dur pour rétablir la confiance de ces femmes; cinq ans de conversations, même de nuit, de relation face à face. Ce n'est pas une technique, mais une façon différente de concevoir les relations humaines. »


Giorgio Antonucci et Dacia Maraini

« Quelle est cette nouvelle méthode qui concerne les ainsi-nommés "malades mentaux"?  » demande l'écrivain. « Pour moi, cela signifie que les malades mentaux n'existent pas et que la psychiatrie doit être complètement éliminée. Les médecins ne devraient traiter que les maladies corporelles. Historiquement en Europe, la psychiatrie est née dans une période où la société était organisée de manière plus stricte, et il fallait de larges déplacements de main-d'œuvre. Au cours de ces déportations, dans des conditions difficiles et hostiles, beaucoup de gens sont restés perturbés, confus, ne produisaient plus de produits et il fallut donc les mettre de côté. Rosa Luxemburg a dit: "Avec l'accumulation de capitaux et le mouvement des gens, les ghettos du prolétariat s'élargirent". »

Au 17ème siècle, lorsque la monarchie absolue (l'État) prend forme en France, les asiles sont appelés "centres d'hébergement pour les pauvres qui ennuient la communauté". La psychiatrie est venue ensuite, en tant que couverture idéologique. Dans le traité psychiatrique de Bleuler, l'inventeur du terme schizophrénie, il est écrit que les schizophrènes sont ceux qui souffrent de dépression, qui se tiennent debout sans bouger ou bien courent dans la cour. Mais que pouvaient-ils faire d'autre en tant que détenus? Finalement, Bleuler conclut involontairement: « Ils sont tellement étranges que parfois ils nous ressemblent ».

(traduit de l'anglais)

vendredi 4 août 2017

En Italie, nous n'avons pas de loi contre la torture, par Erveda Sansi, campagne prohibition absolue

En Italie, nous n'avons pas de loi contre la torture,

Par Erveda Sansi, 26 mars 2016

Campagne prohibition absolue des traitements forcés et des hospitalisations forcées.



Dessin de Vincenzo Iannuzzi

    En Italie, la situation dans le domaine psychiatrique, presque sans exception, a empiré depuis la période de remise en question de l'institution psychiatrique, au début des années soixante. Ensuite, l'Italie a été à l'avant-garde de la fermeture des hôpitaux psychiatriques. Non seulement Giorgio Antonucci, Franco Basaglia et de nombreux professionnels, mais aussi une bonne partie des personnes ordinaires, se sont rendu compte que les hôpitaux psychiatriques n'étaient pas des lieux de soins. La société civile, alors, était sensible à la question de la démolition de la culture d'asile. Des publications sont apparues, il y a eu un débat ouvert, les travailleurs et les étudiants se sont organisés et sont entrés dans les asiles pour voir les conditions dans lesquelles leurs concitoyens étaient enfermés. Ils ont protesté et dénoncé les conditions déplorables dans lesquelles les internés ont été forcés de vivre.

Cependant, depuis plusieurs années, nous observons un processus de réinstitutionnalisation et, en même temps, dans certains services psychiatriques de l'hôpital italien, sont survenus de nombreux faits déplorables, en raison du traitement forcé, de l'institutionnalisation et de la contention forcée. Certains de ces faits sont devenus connus et outrageants après que les comités et les parents aient demandé justice, comme dans le cas de l'enseignant bien-aimé Francesco Mastrogiovanni, 58 ans, qui a été débattu aussi sur les chaînes de télévision nationales. Francesco Mastrogiovanni, après un traitement psychiatrique forcé le 4 Août 2009, (en raison d'une infraction au code de la route: circuler, la nuit, dans une rue fermée à la circulation), a été placé sous sédation lourde, attaché au lit dans le service de l'hôpital psychiatrique de "Vallo della Lucania", et laissé mourir après quatre jours d'abandon. Pendant les 80 heures d'hospitalisation, il n'a été nourri que de solutions salines; Il était attaché les mains et les pieds au lit, dans une position telle que ses fonctions respiratoires étaient compromises et il était sous sédatifs avec des doses élevées de médicaments psychiatriques, sans surveillance du personnel. Aux poignets et aux chevilles, il y a des abrasions de 4 cm de large. Une caméra cachée a tout enregistré; la vidéo est dans le domaine public. Au procès, les médecins responsables ont été reconnus coupables et ont été condamnés à une détention de 3 et 4 ans, une peine qu'ils n'auront pas à servir, du fait des clauses atténuantes. Les 12 infirmières ont été acquittées parce qu'elles "ont obéi à un ordre". Le Comité vérité et la justice pour Francesco Mastrogiovanni, demande cette vérité et cette justice. Regardez également le film "87 ore gli ultimi giorni di Francesco Mastrogiovanni" (87 heures, les derniers jours de Francesco Mastrogiovanni), de Costanza Quadriglio.

En Italie, certaines morts dues à une hospitalisation forcée et / ou à une utilisation prolongée ou de courte durée de la contrainte mécanique et chimique ont été signalées par la presse, la télévision et le web (cela signifie qu'il y a beaucoup d'autres "incidents", dont nous n'avons pas connaissance):

27 octobre 2005: Riccardo Rasman meurt lors d'un traitement coercitif par les policiers, pour une hospitalisation contre son gré, dans un service psychiatrique de Trieste.

21 juin 2006: Giseppe Casu, coupable d'avoir voulu poursuivre son travail de marchand ambulant sur la place du village, meurt dans un hôpital psychiatrique de l'hôpital "Santissima Trinità" de Cagliari, à la suite d'une thromboembolie, après une hospitalisation forcée et ayant été lourdement sédaté. Il a été attaché aux mains et aux pieds au lit pendant 7 jours et a été sédaté avec de fortes doses de médicaments psychiatriques contre sa volonté.

28 août 2006: A.S. est admis le 17 Août 2006 dans le service psychiatrique de Palerme, pour des examens médicaux. A.S. est mort après 2 jours de coma, le 28 Août, probablement pour des doses excessives de médicaments psychiatriques.

26 mai 2007: Edmond Idehen, un homme nigérian de 38 ans, est allé volontairement dans le service psychiatrique de l'hôpital de Bologne "Istituto Psichiatrico Ottonello - Ospedale Maggiore Bologna". Comme il a essayé de quitter l'hôpital, parce qu'il ne se sentait pas pris en charge, les médecins l'ont obligé à rester, avec l'aide des policiers. Edmond Idehen est mort en conséquence d'une attaque cardiaque tandis que les infirmières et les policiers l'ont maintenu à terre. Il a également été fortement sédaté par des médicaments psychiatriques.

12 juin 2006: Roberto Melino, âgé de 24 ans, meurt pour une attaque cardiaque; Il est entré volontairement dans le service psychiatrique de l'hôpital "San Giuseppe" d'Empoli. Alors qu'il tentait de quitter l'hôpital, il a été forcé de rester par les médecins et obligé de prendre de fortes doses de médicaments psychiatriques, malgré ses difficultés de souffle évidentes et sérieuses.

15 juin 2008: Giuseppe Uva, âgé de 43 ans, a été amené dans un poste de police, car il conduisait en état de haut niveau d'alcoolémie. Là, il a été soumis à des mauvais traitements. Après 3 heures, il a été forcé à une hospitalisation obligatoire dans l'hôpital "Circolo" de Varese et a été obligé de prendre des médicaments psychiatriques. Il est mort en raison du stress provoqué par le mélange d'alcool et de médicaments psychiatriques.

30 août 2010: Lauretana La Coca, âgée de 32 ans, est entrée volontairement dans l'hôpital "Salvatore Cimino" de Termini Imerese. Après 10 jours d'hospitalisation, son état a empiré, jusqu'à ce qu'elle passe en état comateux et meurre.

Giuseppe D.: Un homme de plus de 70 ans a été interné dans la prison psychiatrique de Reggio Emilia. Son problème était que la fille du voisin était un psychiatre. Son avocat a intenté une action en justice devant la Cour européenne des droits de l'homme, mais jusqu'à maintenant il n'y a pas eu de réponse, de sorte que le groupe d'étudiants de Pise "Collettivo Antipsichiatrico Artaud", ainsi que "Telefono viola" de Milan, ont décidé de publier la documentation relative à cette affaire sur internet, selon la volonté de Giuseppe D., son avocat et ses proches.

2 avril 2010: Eric Beamont, âgé de 37 ans, le 2 avril 2010 a été hospitalisé à Lamezia. Au bout de 2 jours, il est entré dans le coma, de sorte que les médecins l'ont transféré dans l'hôpital "Pugliese-Ciaccio" de Catanzaro, où il est décédé. Il est suspecté que la mort d'Eric ait été causée par une forte dose de benzodiazépines. Le diagnostic était: hémorragie sous-arachnoïdienne [1]

28 mai 2015 Massimiliano Malzone est mort lors d'un traitement forcé.

11 juillet 2015 Amedeo Testarmata est mort pendant un traitement forcé.

29 juillet 2015 Mauro Guerra est décédé lors d'un traitement forcé.

5 août 2015 Andrea Soldi est décédée pendant un traitement forcé ...

Malheureusement dans cet article, nous n'avons pas décrit des événements isolés, mais une situation emblématique de violation des droits de l'homme dans les établissements psychiatriques italiens.

Ce ne sont là que quelques-uns des "incidents" qui ont été portés au grand jour, mais beaucoup d'entre eux ne sont pas connus quand ils se produisent, parce que, par exemple, des personnes qui vivent dans la solitude sont impliquées ou des personnes dont les proches ont donné leur consentement ou simplement lorsque les gens veulent se débarrasser d'une personne perçue comme ennuyeuse. A l'association "Il Cappellaio Matto" (le Chapelier Fou), nous voyons constamment des traitements psychiatriques forcés, au cours desquels les personnes traitées subissent de lourds dommages. Les traitements forcés sont souvent effectués sur demande de parents, lorsque les patients refusent de prendre plus longtemps les médicaments psychiatriques ou lorsque leur comportement est perçu comme perturbateur. Un de nos amis (IM) a essayé de s'échapper, mais il a été chassé et rempli de drogues; Peu de temps après, il a été retrouvé mort au fond d'un ravin. Il avait 40 ans. Un autre ami (AS) marchait sur un chemin entre les champs et a été arrêté par la police, parce qu'il était connu comme une personne "mentalement malade". Ensuite, ils ont appelé le psychiatre de service et lui ont dit: "Il se promenait près de la voie ferrée et aurait peut-être l'intention de se suicider"; Alors ils l'ont enfermé. Je connais cette personne, qui marche souvent dans les champs, où, cependant, il est facile d'être situé près du chemin de fer, en raison de la constitution du terrain. Il n'avait jamais l'intention de se suicider. Une autre de nos connaissances est morte, se jetant sous un train, terrifié par le fait que sa mère, selon le psychiatre, avait parlé d'un traitement psychiatrique forcé pour lui. Un autre (US) a souffert d'un harcèlement lourd, après avoir signalé le détournement de fonds de son supérieur, remarqué lors de ses fonctions de technicien municipal. Il a été soumis à un traitement psychiatrique forcé, enlevé par la police en équipement anti-émeutes. Pendant qu'il dormait, sa porte a été enfoncée, et il a été jeté sur le sol, face contre terre et menotté. Il dit qu'au moins ils auraient pu essayer d'ouvrir la porte, qui n'était pas verrouillée. Maintenant, il est terrifié et il craint même l'obscurité; Il est obligé de prendre des médicaments psychiatriques.

Nous ne pouvons pas penser à la désinstitutionnalisation avant d'avoir rejeté les règles qui permettent le traitement psychiatrique forcé, qui permettent de détenir une personne contre son gré, sans avoir commis de crime, sans avoir droit à un procès équitable, pour motif de dangerosité présumée et seulement parce que cette personne a été diagnostiquée avec une maladie mentale.

Ladite "loi Basaglia", loi n° 180 du 13.5.1978, complétée et réellement implémentée par les articles 33, 34, 35, 64 de la loi 833/1978, régit les "Accertamenti e Trattamenti sanitari volontari e obbligatori" ("Vérifications et traitements forcés de la santé"). En 1978, la loi n° 180 a imposé la fermeture des asiles, et l'élimination de la dangerosité et / ou du scandale public comme critères pour le traitement forcé. Mais dans la plupart des provinces italiennes, les asiles n'ont pas fermé leurs portes. Il fallait donc faire une autre loi (parce que ces asiles étaient trop coûteux), la loi n° 724 du 23.12.1994, art. 3, paragraphe 5, qui décrète que ces asiles devaient être fermés au 31.12.1996; A nouveau ignorée, et différée jusqu'à la fin de 1999. En 1996, les détenus en asile en Italie étaient 11.516 dans 62 asiles publics et 4.752 dans les asiles privés.

Selon l'article de cette loi n° 180, le traitement forcé et l'hospitalisation forcée associée, sont possibles si les conditions suivantes sont présentes: 
  1. Une personne "souffrant de maladie mentale" nécessite un traitement médical urgent; 
  2. Elle refuse le traitement; 
  3. Il n'est pas possible de prendre des mesures adéquates à l'extérieur des hôpitaux. 

Les traitements forcés ont une durée maximale de sept jours, mais peuvent être renouvelés si nécessaire et ensuite prolongés s'il persiste un besoin clinique motivé (ce n'est pas une exception que la durée soit prolongée pendant des mois et des années). Pour les traitements forcés et par conséquent la limitation de la liberté personnelle, il doit y avoir une demande signée par deux médecins, une validation administrative du maire est requise, suivie de la validation d'un contrôle judiciaire par le juge des tutelles.

La législation sur le traitement psychiatrique forcé offre une large marge d'arbitraire et contraste fortement avec la réglementation en matière de droits de l'homme, visant à préserver même les personnes handicapées des traitements inhumains et dégradants. Pour ceux qui commettent un crime, on s'attend à ce que l'autorité judiciaire, conformément à certaines règles de procédure spécifiques, sanctionne ou impose des mesures restrictives. Nous avons constamment des personnes innocentes dans le traitement psychiatrique forcé, qui ne peuvent plus trouver un moyen de sortir de l'établissement psychiatrique.

« Je dois avouer », a déclaré un psychiatre, « avoir une personne complètement en mon pouvoir, m'a fait ressentir une sorte de frisson sadique. »

En Italie, la CDPH (Convention ONU relative aux Droits des Personnes Handicapées) a été ratifiée en 2009. Mais à l'heure actuelle, nous n'avons pas de loi contre la torture, la torture n'est pas un crime, la torture n'est pas interdite en Italie. Donc, ceux qui torturent ne violent pas la loi. En attendant, beaucoup d'établissements psychiatriques intermédiaires (également appelés petits asiles) ont été construits. Ils sont publics ou privés et remboursés par l'Etat. Une très bonne affaire est derrière cela. Quelques autres exemples: Décret du président de la République de Lazio, Polverini, sur le système hospitalier du Latium: le nombre de lits dans les établissements psychiatriques augmente de 369 à 629; Plus de 70%. 50 lits pour la structure publique et 210 pour la structure privée enclencheront la mécanique de chronicisation des personnes.

260 lits = 90 000 jours de vie soustraits aux personnes pour un coût de 10 000 000 €.

Est-ce que la loi Basaglia ne prévoyait pas la fermeture des asiles?

« Professeur Antonucci, quel est, à ce jour, le statut de la mise en œuvre de la loi 180?  »

« - En dehors d'un seul cas exceptionnel, ce qu'a proposé Franco Basaglia n'est pas réalisé, mais on continue une entreprise que Basaglia n'approuverait évidemment pas: les interventions autoritaires, s'emparer des personnes de force et les emmener dans les cliniques psychiatriques, qui sont la continuation de l'asile. L'asile a été établi par l'intervention autoritaire: je prends une personne contre sa volonté, puis je la soumets à une série d'interventions forcées, qui sont l'essence de l'hôpital psychiatrique. » (http://www.psicoterapia.it)

La situation déplorable des six hôpitaux psychiatriques judiciaires est devenue plus visible, après l'inspection surprise faite par un comité parlementaire. Les vidéos des visites, montrées par la télévision nationale, et les communiqués de presse se trouvent sur le web. Un rapport parlementaire avait déjà été réalisé en juin 2010, mais les photographies montrent une situation qui, jusqu'à présent, n'a pas encore changé. Les personnes détenues depuis des décennies pour des infractions mineures, dont la peine aurait expiré depuis longtemps, si elle n'avait pas été renouvelée à plusieurs reprises et automatiquement.

Ci-dessous, nous rapportons certaines données extraites du texte du rapport parlementaire sur l'inspection de juin 2010 des 6 prisons psychiatriques italiennes (institutions judiciaires) encore actives (le sénateur Ignazio Marino, médecin, a été président du Comité d'enquête sur le Système national de soins de santé). Après la "loi Basaglia" de 1978, les asiles devaient être fermés, mais les 6 prisons psychiatriques mentionnées ci-dessus continuent à faire le même travail. Le sénateur Marino était également préoccupé par l'augmentation des électrochocs (à partir de 9 établissements autorisés à donner des électrochocs avant 2008, nous avons maintenant plus de 90 établissements psychiatriques qui dispensent l'ECT).

Les règlements et les logiques qui gèrent ces prisons psychiatriques (institutions judiciaires), (en italien OPG-Ospedale Psichiatrico Giudiziario), sont les mêmes hérités par le code fasciste Rocco (1934). 40% des 1500 condamnés réels auraient déjà été libérés, les durées de détention ayant expiré, mais ils voient leurs fins de peine reportées au nom de leur prétendue dangerosité sociale.

Neuf personnes par cellule, des salles de bains et draps de lit sales; Des blouses d'infirmières sales aussi. Dans Barcellona Pozzo di Gotto (Messina), 329 condamnés sont surpeuplés dans des cellules construites en 1914. De la saleté partout. Un patient a été retrouvé nu, attaché à son lit, avec un hématome sur la tête. Aversa, construit en 1898: 320 personnes enfermées six par cellule, dans des conditions inhumaines.

NAS (Antisofistication and health nucleus of Carabinieri (Police)) a signalé et dénoncé tout cela au parquet, mais ce bureau est souvent constitué des mêmes personnes qui condamnent les patients à vie.

Dans le Secondigliano OPG, la prison psychiatrique est à l'intérieur du centre. Ici, demeure depuis 25 ans un patient qui a reçu une sentence de deux ans. Les brûlures et les yeux noirs ne sont pas rapportés dans le journal clinique. Les pieds et les mains sont gangrenés.

Au Montelupo Fiorentino OPG, ils sont 170 dans dans un bâtiment très délabré. Dans le Reggio Emilia OPG, ils sont 274 où ils devraient être 132. 3 douches servent à 158 ​​patients. L'un est lié à son lit depuis 5 jours pour des raisons disciplinaires. 3 dans 9 mètres carrés. « L'OPG (prison psychiatrique) est l'une des "zones de silence" », explique Alberto, du Collectif Antipsychiatrique de Pise dédié à Antonin Artaud, « et ils montrent l'usage politique de la psychiatrie. La consommation de médicaments psychiatriques est de plus en plus promue, l'électrochoc revient "à la mode", peut-être pour "guérir la dépression post-partum". Et une loi est en embuscade afin de faire passer les conditions d'hospitalisation forcée de 7 à 30 jours. » Après que le scandale fut mis au grand jour, le 17 janvier 2012, le Comité judiciaire du Sénat a approuvé à l'unanimité la fermeture définitive de l'OPG avant le 31 mars 2013. La clôture a été prolongée jusqu'au 31 mars 2015. Après la fermeture des installations en 2015, selon la loi Décret n° 211/2011, convertie en loi n° 9/2012, elles ont été remplacées par des résidences pour l'exécution des mesures de sécurité (R.E.M.S.). Nous devons fermer les hôpitaux psychiatriques judiciaires, au lieu de changer leur nom. Si nous ne fermons pas ces lieux une fois pour toutes, nous ne pouvons pas parler de désinstitutionnalisation. Ne les fermez pas pour transférer leurs utilisateurs vers d'autres institutions psychiatriques, mais pour redonner à ces personnes leur dignité de vie.

Une recherche (source: British Medical Journal) menée dans 6 pays européens (Italie, Espagne, Angleterre, Pays-Bas, Suède, Allemagne), qui ont fermé les asiles dans les années 70, a montré, entre 1990 et 2003, une augmentation du nombre de lits dans Les hôpitaux psychiatriques judiciaires, dans les services psychiatriques, et dans les maisons dites "sécuritaires" (safe houses). Les logements avec soutien (ou thérapeutiques) sont considérés comme une alternative aux asiles, comme un signe de désinstitutionnalisation, mais ils sont plutôt comme une forme d'institutionnalisation. Les traitements forcés augmentent également. La raison pour laquelle le nombre de lits a augmenté dans les hôpitaux psychiatriques judiciaires n'est pas claire, puisqu'il n'y a pas de corrélation entre les crimes comme les homicides et les personnes dé-institutionnalisées.

Il serait important d'élargir la prise de conscience que les traitements forcés, comme la contrainte sont des actes anti-thérapeutiques, qui rendent les guérisons plus difficiles, plutôt que de les faciliter. La contrainte physique n'est pas exercée seilement dans le domaine de la psychiatrie. Les domaines d'intervention où il convient de discuter du problème de la légitimité, de l'utilité et de la pertinence de la contrainte physique ne se limitent pas aux hôpitaux, mais aussi aux établissements de soin pour personnes âgées, aux communautés thérapeutiques pour toxicomanes et aux établissements de soins pour personnes handicapées liées à des déficiences congénitales ou précoces. Une amélioration de la pratique infirmière psychiatrique, caractérisée par la renonciation à la contrainte physique, constituerait un signal fort pour détecter le problème également dans d'autres environnements, incitant ceux qui travaillent dans ce domaine à agir avec des pratiques similaires, plutot qu'avec des pratiques restrictives.

En ce qui concerne les médicaments psychiatriques, il existe des règles de la Convention sur les droits de l'homme, qui exigent le consentement pleinement informé de l'utilisateur, avant de les administrer, même si la personne est handicapée. La plupart des médicaments psychiatriques sont prescrits pendant longtemps, parfois pour la vie, sans informer l'utilisateur sur leurs effets et sans aucune aide dans la résolution de ses problèmes réels et existentiels. Les médicaments psychiatriques peuvent causer des maladies neurologiques, qui deviennent parfois irréversibles. L'akathisie, la dyskinésie, sont des effets très désagréables et peuvent jeter une personne dans le désespoir. Souvent, l'utilisateur est encouragé à continuer de prendre les médicaments même s'il demande à les arrêter, et il est presque impossible de trouver des professionnels qui aident et donnent des directives pour le sevrage. Peter Breggin, un psychiatre qui travaille avec des institutions comme l'OMS (Organisation mondiale de la santé) et la FDA ("Food and Drug Administration" américaine), a écrit des centaines de pages sur les effets néfastes des médicaments psychiatriques. Peter Lehmann, qui a testé les effets des drogues sur lui-même lors de son hospitalisation dans une clinique psychiatrique, a publié et continue de publier les résultats de ses recherches pour lesquels il utilise la littérature pharmaceutique et médicale. L'effet des médicaments psychiatriques est connu, mais l'industrie au milliard de dollars derrière ceux-ci est trop importante pour perdre ce marché. Peter Lehmann est le premier survivant de la psychiatrie à recevoir un diplôme d'honneur, qui lui a été conféré par la faculté de psychologie clinique de l'Université Aristotele de Thessaloniki, pour son travail de chercheur et de militant dans le domaine de la santé mentale.

Une personne qui commence à prendre ces médicaments, dans la plupart des cas, sera amenée à les prendre à vie, car ils créent des problèmes de dépendance. L'utilisateur psychiatrique développe une forte dépendance envers le service psychiatrique aussi. Pour les psychiatres, le défaut de compliance au traitement lui-même est en fait interprété comme une aggravation de la maladie. Ensuite, le conditionnement prend place, et va dans la direction de la dépendance aux services psychiatriques, de devenir "comme un enfant" et "patient chronique".

Bien que dans presque tous les pays européens, les asiles et les hôpitaux psychiatriques aient été éliminés ou substantiellement réduits, cela ne signifie pas que dans les nouvelles structures post-asile, les dispositifs propres aux asiles aient été éliminés. Les personnes sont, à quelques exceptions près, complètement sédatées par des médicaments psychiatriques, même si apparemment il existe des programmes mis en place tels que l'art thérapie. L'ingestion de médicaments psychiatriques est également encouragée pour rendre l'utilisateur inconscient.

Erwin Redig, un survivant psychiatrique allemand, déclare: « Il y a des personnes qui font pression sur nous pour nous forcer à les prendre (médicaments psychiatriques). Si nous ne les prenons pas, nos changements les gênent. Si tel est notre cas, nous devons nous convaincre nous-mêmes que nous avalons les drogues pour le bien-être des autres, parce qu'ils nous trouvent désagréables si nous ne le faisons pas. »

« Le dispositif pour "mal-être complexe", qui opère dans une petite résidence, agit plus largement dans la société ». Les médicaments neuroleptiques affectent la pensée, bloquent le flux de pensées et rendent les personnes "plus plates". Je rapporte les mots d'un professionnel de la santé: « Dès que les médicaments psychiatriques sont administrés aux personnes, ils sont éteints littéralement. Dans quelle mesure est-il juste d'annuler la personne? » Bien que dans les pays européens, la psychiatrie asilaire et l'hospitalisation psychiatrique des utilisateurs aient cédé la place aux communautés, la culture de l'établissement psychiatrique n'a pas changé. Les habitudes d'asile demeurent actives. Mais surtout, il existe encore une mentalité d'asile, il est donc important pour tout le monde de savoir combien la mentalité de chacun est cruciale pour créer ou ne pas créer des dispositifs qui appartiennent à l'institution psychiatrique; Dispositifs opérationnels qui constituent un module opérationnel généralisé: les "structures intermédiaires résidentielles", prévues en Italie par la loi de 1983, auraient du être spécifiquement de nature provisoire; Par conséquent, ils ne devraient pas constituer ni une admission définitive ni un lieu final pour l'hospitalisation forcée; Ils auraient dû être des logements de transition, qui puissent briser les préjugés et les logiques d'exclusion. En mars 1999, par un décret spécial, les régions italiennes ont imposé la fermeture définitive des asiles, sous la menace de fortes sanctions économiques, car, malgré la naissance, sur le papier, des nouveaux "services locaux", les hôpitaux psychiatriques étaient encore surpeuplés de patients.

Dénommées de l'épithète dérogatoire de "résidus d'asile", pour ces personnes dont personne ne voulait, les structures résidentielles représentaient une illusion de liberté; Elles se sont fondées pour être encore dans une institution psychiatrique. « Beaucoup de patients », écrit l'un d'entre eux dans une autobiographie, « n'ont jamais été aussi bien en termes de confort, mais néanmoins ils sont dans une effroyable désolation ».

Un besoin induit de sécurité, la défense d'un malade mental potentiellement dangereux qui, à tout moment, pendant une crise, pourrait commettre des actes odieux contre d'autres personnes ou contre lui-même: rapidement, sur la base de ce besoin et de ces faux fondements scientifiques, nous construisons le mythe du besoin d'institutions psychiatriques post-asiles. Si nous ne réussissons pas à nous débarrasser des préjugés psychiatriques, l'institution de "santé mentale" demeure. Il existe de nombreuses alternatives poursuivies par des individus, des associations ou des institutions, mais elles sont délibérément ignorées. La responsabilité de résoudre les problèmes d'institutionnalisation ne dépend pas uniquement des psychiatres ou des professionnels de la santé mentale, mais à l'ensemble de la société civile. Tout le monde contribue à la mentalité d'asile. Les utilisateurs y compris, qui ont intériorisé le diagnostic psychiatrique et ne peuvent plus vivre sans cela.

Mary Nettle, présidente d'ENUSP (European Network of Users and Survivors of Pasychiatry) jusqu'en 2010, s'attend à une implication croissante des utilisateurs et des survivants de la psychiatrie dans les recherches sur la psychiatrie; Alors qu'ils sont souvent exclus ou non payés sous prétexte qu'ils ne sont pas des professionnels.

Bien que de nombreux exemples existent qui prouvent que vous pouvez accompagner une personne dans les troubles à sortir de ses problèmes, par le dialogue et le soutien dans la résolution des difficultés objectives et matérielles, et de l'aider à prendre conscience de ses propres droits, ces expériences et leurs résultats positifs continuent à être délibérément ignorés.

(traduit de l'anglais)