dimanche 4 juin 2023

Pourquoi il faut arrêter les programmes de soins.

En France, en 2021, 95473 personnes étaient en "soins sans consentement", et 39244 en "programme de soins" [1]. Ajoutez ce qui est pratiqué dans les ESMS dans l'opacité et les enfants dont on ne demande pas l'avis. Ces personnes sont placées sous chimiothérapie lourde contre leur volonté. Pourquoi arrêter ces pratiques, par Luc Thibaud.


- 1 Parce que ce ne sont pas des soins.

La meilleure réponse prouvée à la crise psychosociale dite "psychose" n'est pas l'approche médicamenteuse lourde et l'hospitalisation mais l'approche finlandaise "Open Dialogue", et de très loin [2].

Les sédatifs légers (benzodiazépines) sont meilleurs que les neuroleptiques dans la gestion de la crise [3].

Les thérapies cognitives constituent une bonne alternative aux approches médicamenteuses [4].

Les personnes guéries favorisent aussi les approches nutritionnelles, psycho-corporelles, et de résolution des traumatismes passés, connus ou oubliés.

Pour les survivants de la psychiatrie comme Tina Minkowitz, le soutien en cas de crise devrait être communautaire, démédicalisé et déjudiciarisé [5].

Pratiquer la santé mentale, c'est, en premier, le travail de défendre les droits humains de la personne. C'est aussi le devoir de chacun.

La crise est une occasion de prise de conscience, de communication, de changement, de s'engager dans un travail sur soi, de guérison et de progrès, à condition que la personne ne soit pas désignée comme "le problème" à éliminer ou "la maladie" à combattre. Le changement ne concerne pas seulement la personne elle-même mais aussi son entourage et quelquefois la société toute entière.

En réalité, l'approche médicamenteuse lourde n'est pas un soin, mais une camisole chimique. Cela n'agit pas directement sur la "psychose" [6], ni sur les hallucinations, mais cela empêche de penser, de mémoriser, et d'accorder du plaisir à quoi que ce soit. La personne est privée de ses moyens. Elle est le plus souvent empêchée de résoudre la crise par le dialogue. Une personne peut choisir cette approche pour elle-même, si elle a été bien informée de toutes les conséquences, et des alternatives, mais cela ne doit pas être contraint et cela doit rester souple. En revanche, ces produits sont beaucoup trop toxiques pour être prescrits aux enfants.

Une crise est un épisode qui ne doit pas durer. Mais le programme de soins n'est pas un traitement de courte durée. Un examen psychiatrique évalue le médicament, pas la personne. Alors le médecin, par défaut, se base sur les essais truqués des laboratoires et sur des concepts non validés qui sont calqués au pifomètre sur la personne [7]. On ne remet pas en cause un "diagnostic" psychiatrique. Je mets des guillemets à diagnostic car ce n'est pas une enquête causale le plus souvent, mais un ensemble de tiroirs de la demande de médicalisation des difficultés psychosociales des personnes, et de leur entourage. Le sevrage des neuroleptiques est difficile à mener, et à réussir. Le confort des soignants et de l'entourage est donc de médiquer sans limitation de durée: mais c'est contraire à l'intérêt de la personne, et cela la détruit lentement. Avec les programmes de soins, on transforme l'épisode de crise en invalidité sur le très long terme.

Les études de long terme ont démontré que le traitement neuroleptique prolongé était nuisible à la personne et empêchait les guérisons spontanées [8][9].

Les produits utilisés sont extrêmement nuisibles à la santé, en particulier sur le long terme. Le système nerveux est endommagé: dyskinésies tardives, hypertonies, insuffisances cérébrales. Perturbations endocriniennes, obésité, diabète, troubles cardiaques, espérance de vie réduite.

Les produits utilisés induisent assez vite des dépendances lourdes. Pour la plupart des personnes, les syndromes de sevrage sont longs et éprouvants, à la fois physiques et psychologiques. Le sevrage se fait par paliers de baisse exponentielle des doses, cela peut durer des mois. Le cerveau s'adapte au produit, il a été démontré que cette adaptation pouvait persister des mois après le sevrage des produits, sous la forme d'une psychose d'adaptation aux neuroleptiques [10]. Les psychiatres qualifient de "rechute" toute crise qui suit une réduction des doses ou un arrêt des produits. Le terme scientifique n'est pas "rechute" mais syndrome de sevrage.


- 2 Parce que cela réalise une torture.

Le traitement forcé aux neuroleptiques est pratiqué aujourdhui dans les geôles où sont torturés les opposants politiques en Iran [11].

L'akathisie [12] induite par les neuroleptiques est associée aux pensées suicidaires, aux violences, aux suicides [7]. C'est un élément de cette torture aux neuroleptiques, en même temps que la constipation, la rétention d'urine, et tous les troubles neurologiques induits par ces produits.

Les programmes de soins en France sont basés sur la menace et l'intimidation. Ils incitent à traumatiser et à re-traumatiser les personnes par des arrestations, quelquefois violentes, avec la police, les chiens, et par des séjours dans des établissements caractérisés par les humiliations, la non-communication, les punitions de contention et isolement, et les traitements forcés. On ne sort de ces enfers qu'en jouant la comédie de la stabilisation sous traitement: c'est le témoignage de mes correspondants.

Les personnes sont gravement traumatisées par ce système [13]. Beaucoup se suicident à la suite d'une hospitalisation forcée [14].

La justice en France n'est d'aucune aide: absence de contradictoire, non-indépendance vis à vis du pouvoir médical [15]. Le choix du praticien, qui est un droit constitutionnel, n'est pas effectif. Le choix de l'approche n'existe pas non plus. Les documents médicaux reposent sur des arguments stupides ou circulaires: "Vous ne consentez pas, c'est donc la preuve que vous êtes dans l'incapacité de consentir". Et des tautologies: "Vous rejetez le diagnostic, c'est un signe qui confirme le diagnostic." Et aucune preuve scientifique n'est jamais fournie.

L'information sur les différentes approches possibles, pharmacologiques ou psychosociales, leurs effets indésirables, leur durée, leur modalité de fin, l'évaluation de leur efficacité, ne sont généralement pas fournis, ni même envisagés [16].


- 3 Parce que l'ONU et l'OMS l'interdisent.

La Convention CDPH interdit explicitement les traitements forcés aux paragraphes E. et F. des Directives sur l'article 14, adoptées par le Comité CDPH à sa quatorzième session du 17 août au 4 septembre 2015 [17].

L'OMS propose des outils de transformation des pratiques ainsi que des formations [18].


Courrier au Président français Emmanuel Macron.

Pétition.

Luc Thibaud est ex-usager, auteur, psychopraticien.
Membre d'ENUSP, du REV-France.


Références:

  1. IRDES, 2022 “Les soins sans consentement et les pratiques privatives de liberté en psychiatrie : un objectif de réduction qui reste à atteindre” Magali Coldefy (Irdes), Coralie Gandré (Irdes, Hôpital universitaire Robert-Debré), avec la collaboration de Stéphanie Rallo (ARS Paca) https://www.irdes.fr/donnees/269-les-soins-sans-consentement-et-les-pratiques-privatives-de-liberte-en-psychiatrie.xls

  2. Bergström T, Seikkula J, Alakare B, Mäki P, Köngäs-Saviaro P, Taskila JJ et al. "The family-oriented Open Dialogue approach in the treatment of first-episode psychosis: nineteen-year outcomes." Psychiatry Res. 2018;270:168-75. doi: 10.1016/j.psychres.2018.09.039.

  3. Dold M, Li C, Tardy M, Khorsand V, Gillies D, Leucht S. "Benzodiazepines for schizophrenia." Cochrane Database Syst Rev. 2012 Nov 14;11(11):CD006391. doi: 10.1002/14651858.CD006391.pub2. PMID: 23152236; PMCID: PMC7052813.

  4. Morrison AP, Turkington D, Pyle M, Spencer H, Brabban A, Dunn G, Christodoulides T, Dudley R, Chapman N, Callcott P, Grace T, Lumley V, Drage L, Tully S, Irving K, Cummings A, Byrne R, Davies LM, Hutton P. "Cognitive therapy for people with schizophrenia spectrum disorders not taking antipsychotic drugs: a single-blind randomised controlled trial." Lancet. 2014 Apr 19;383(9926):1395-403. doi: 10.1016/S0140-6736(13)62246-1. Epub 2014 Feb 6. PMID: 24508320.

  5. Tina Minkowitz, "Reimagining Crisis Support: Matrix, Roadmap and Policy", 2021. https://www.reimaginingcrisissupport.org/

  6. Shona M Francey and others, "Psychosocial Intervention With or Without Antipsychotic Medication for First-Episode Psychosis: A Randomized Noninferiority Clinical Trial", Schizophrenia Bulletin Open, Volume 1, Issue 1, January 2020, sgaa015, https://doi.org/10.1093/schizbullopen/sgaa015

  7. Peter C Gøtzsche, "Critical psychiatry textbook", 2022
    https://www.scientificfreedom.dk/books/

  8. M. Harrow*, T. H. Jobe and R. N. Faul. "Does treatment of schizophrenia with antipsychotic
    medications eliminate or reduce psychosis? A 20-year multi-follow-up study"
    Psychological Medicine, Page 1 of 10. © Cambridge University Press 2014
    doi:10.1017/S0033291714000610
    https://www.mentalhealthexcellence.org/wp-content/uploads/2013/08/HarrowJobePsychMedMarch2014.pdf

  9. Wunderink L, Nieboer RM, Wiersma D, Sytema S, Nienhuis FJ. "Recovery in Remitted First-Episode Psychosis at 7 Years of Follow-up of an Early Dose Reduction/Discontinuation or Maintenance Treatment Strategy: Long-term Follow-up of a 2-Year Randomized Clinical Trial." JAMA Psychiatry. 2013;70(9):913–920. doi:10.1001/jamapsychiatry.2013.19
    http://archpsyc.jamanetwork.com/article.aspx?articleid=1707650

  10. Chouinard G, Samaha A, -N, Chouinard V, -A, Peretti C, -S, Kanahara N, Takase M, Iyo M (2017). "Antipsychotic-Induced Dopamine Supersensitivity Psychosis: Pharmacology, Criteria, and Therapy". Psychother Psychosom 2017;86:189-219. doi: 10.1159/000477313
    https://www.karger.com/Article/FullText/477313
     
  11. Torture aux neuroleptiques des opposants politiques en Iran.
    https://iranwire.com/en/features/67428/

  12. Akathisie aux neuroleptiques.
    RxISK Medical Team, 2016, "What is akathisia?"
    http://rxisk.org/akathisia/

  13. Priebe, Stefan & Bröker, Matthias & Gunkel, Stefan. (1998). "Involuntary admission and posttraumatic stress disorder in schizophrenia patients." Comprehensive psychiatry. 39. 220-4. 10.1016/S0010-440X(98)90064-5.

  14. Hjorthøj CR, Madsen T, Agerbo E, Nordentoft M. "Risk of suicide according to level of psychiatric treatment: a nationwide nested case-control study". Soc Psychiatry Psychiatr Epidemiol. 2014 Sep;49(9):1357-65. doi: 10.1007/s00127-014-0860-x. Epub 2014 Mar 18. PMID: 24647741.

  15. Cour de Cassation, arrêt n°16-22.544 du 27 septembre 2017, 6ème.
    https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000035681676?isSuggest=true

  16. John Read, "The experiences of 585 people when they tried to withdraw from antipsychotic drugs,
    Addictive Behaviors Reports", Volume 15, 2022, 100421, ISSN 2352-8532,
    https://doi.org/10.1016/j.abrep.2022.100421.
     
  17. ONU CDPH, "Directives sur l'article 14". Réf: A/72/55.
    https://tbinternet.ohchr.org/_layouts/15/treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=A/72/55&Lang=en

  18. WHO: "QualityRights materials for training, guidance and transformation."
    https://www.who.int/publications/i/item/who-qualityrights-guidance-and-training-tools



2 commentaires:

  1. Mon fils a ete pris en charge par les uhe de La Rochelle a ses 4 ans, il a 13 aujourd'hui il totalise 9 années sous risperdone /risperdale, et l'on me dit qu'il sera sous neuroletique toute sa vie, a l"cole il ne fait que tres peu de mathematique, en revanche il fait du français depuis le denrier trimestre de l'année derniere, on me fabrique une personne, qui servira la France, et si il s'y refuse il iras soit en hp soit en prison!! depui sses 6 ans je me bat pour qu'il puisse beneficier d'une approche de soins plus invasive, je veux dire pr là comme l'indique les canadiens, qu'il puisse etre suivie par la therapie cognitive, la meditation, mais on se fou de moi dpeuis tout ce temps!!! depuis confronter en continue, aujourd'hui je suis une maman dite instable psychiquement, je suis un element pertubant mon enfant... j'ai 50 ans mon fils en a 13, aujourd'hui nous nous voyons 2h 2 fois par mois.

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    1. Depsychiatriser: merci de votre témoignage. Nous pensons que le risperidone est un produit trop dangereux pour être donné à un enfant. Nous pensons que l'enfant doit pouvoir donner son avis sur tout médicament psychiatrique, et cela, à tout moment. La Convention des droits de l'enfant de l'ONU demande que les enfants et les adolescents aient la possibilité d'exercer leur droit au consentement éclairé, d’une manière compatible avec leur âge et leur maturité, réf. CRC/C/GC/15. De même l'OMS, réf. HR/PUB/23/3. Nous pensons aussi qu'aucun médecin n'a le droit de vous stigmatiser avec des étiquettes psychiatriques sans valeur médicale, ni de vous discriminer par rapport à un handicap. Le défenseur des droits est le recours prévu en France par rapport aux violations de vos droits et de ceux de l'enfant.

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